Sud-Kivu : 23 ans après les massacres de Kasika, des défenseurs des droits de l’homme dénoncent le silence de l’oubli de la justice

La population du Sud-Kivu et spécialement du territoire de Mwenga a commémoré le 23è anniversaire du massacre de Kasika mardi 24 août 2021.
Plus de 856 personnes ont été massacrées à Kasika, dans la chefferie de Lwindi. Ces actes ignobles perpétrés par les rebelles du RCD ont été commis dans matinée du lundi 24 août 1998.
La majorité des cadavres découverts sur un trajet de 60 km depuis Kilingutwe jusqu’à Kasika, étaient essentiellement des femmes et des enfants.
23 ans après, les défenseurs des droits humains en province et à travers le pays ne cessent de reclammer justice pour ces centaines des compatriotes «innocents» lâchement massacrés à Kasika.
Cest le cas du coordonnateur provincial de la Dynamique pour la Cohésion Sociale et le Développement “DYCOD”, le Révérend-Pasteur Nicolas Kyalangalilwa qui, dans son message à cette occasion parle de 23 ans entre le dénie, le silence et loubli.
«Et Dieu dit: Qu’as-tu fait? La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi. Maintenant, tu seras maudit de la terre qui a ouvert sa bouche pour recevoir de ta main le sang de ton frère» Genèse 4:10-11.
Le 24 Août 1998 l’impensable se produisit. De paisibles citoyens non-armés sont sauvagement massacrés à Kasika. Le récit ne vaut pas la peine d’être peint, tellement il ressemble au pire film d’horreur ! Ce même drame se répètera dans plusieurs endroits du territoire de Mwenga dans les jours et semaines qui suivront. Le bilan est lourd. La blessure profonde.
«Ce qui étonne est que 23 ans plus tard, on n’en parle presque plus. Les bourreaux ont été non seulement récompensé, et continue à l’être sans être inquiétés, mais surtout la thèse du dénie de ces massacres se défend en pleine capitale (Kinshasa) sous la barbe des dirigeants et cela sans que ces derniers ne bronchent ni n’agissent en faveur de la restauration de la mémoire des victimes. Et pourtant on nous chante “le peuple d’abord” à longueur des journées. De quel peuple parle-t-on ? Ceux morts à Kasika ne semblent définitivement pas faire partie de ce peuple. Leur sort ne préoccupe pas les dirigeants, pas même un mot, pas une larme, pas un geste en leur faveur. Et pourtant quand le feu Président Dr. Magufuli est mort, on a décrété deux jours de deuil. Quand une bombe a explosé à Paris, on a transmis des mots de condoléances ! On pleure les étrangers, on ne sait même pas pleurer ses propres frères et surs ! Quelle malédiction ! Quelle honte !».
23 ans plus tard, la vérité n’est toujours pas mise au clair, les auteurs et acteurs de ces actes macabres se la coulent douce pendant que les familles des victimes vivent dans la douleur et les âmes de leurs parents errent sans repos.
«Qui aidera ces morts à trouver justice quand les dirigeants sanctifient les bourreaux et sacrifient la mémoire des morts à l’autel des intérêts politiques et de léternisation du pouvoir ? Et cette soi-disant communauté internationale hypocrite qui fait semblant de ne pas voir ni entendre ces voix qui demandent justice depuis 23 ans. Et même cette force onusienne qui continuant à étendre indéfiniment son séjour dans ce pays, joue à la politique de l’Autriche», a-t-il poursuivit dans son message.
Il s’indigne du fait que 23 ans après, aucun député (national ou provincial) de ce territoire (Mwenga) na osé proposer une loi qui consacre cette journée comme celle commémorant les millions des morts des différentes guerres du Congo.
«En attendant, Kasika pleure encore une fois en cette journée du 24 Août 2021, pour la 23eme fois ! Et Dieu seul sait combien de temps encore avant que ses morts ne reposent en paix. Une chose est certaine, ce pays n’aura de paix réelle que quand ses morts auront été honorés, les coupables punis et la vérité mise à nue alors les âmes des massacrés reposeront en paix»,
Et il poursuit :
“Le sang souille le pays; et il ne sera fait pour le pays aucune expiation du sang qui y sera répandu que par le sang de celui qui l’aura répandu».
Pascal Digadiga Ngabo/L’INTERVIEW.CD