Bukanga-Lonzo : Matata Ponyo face à un procès repoussé

Bukanga-Lonzo : Matata Ponyo face à un procès repoussé

Kinshasa, 16 avril 2025 – L’affaire Bukanga-Lonzo, véritable feuilleton judiciaire en République Démocratique du Congo, connaît un énième report. Prévue pour avancer cette semaine, l’instruction a été renvoyée au mercredi 23 avril 2025, selon les dernières annonces de la Cour constitutionnelle. Ce nouveau décalage prolonge l’attente dans un dossier explosif, où se mêlent accusations de détournement de fonds publics, luttes politiques et espoirs déçus d’un projet agricole ambitieux.

Au cœur de cette saga, le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo, lancé il y a plus d’une décennie pour révolutionner l’agriculture congolaise. Ce projet, porté à l’époque par l’administration de Joseph Kabila, avait suscité l’enthousiasme avec des promesses de modernité et d’autosuffisance alimentaire. Mais les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 200 millions de dollars investis, et pourtant, le parc est aujourd’hui un symbole d’échec, avec des champs à l’abandon et des infrastructures inachevées.

Les accusations pleuvent sur les principaux acteurs du projet. L’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo, l’ex-gouverneur de la Banque centrale Deogratias Mutombo et l’homme d’affaires sud-africain Kristo Glober sont pointés du doigt pour une gestion jugée chaotique. Les autorités reprochent à ce trio d’avoir détourné des fonds colossaux, à travers des contrats douteux et des dépenses injustifiées. Des rapports accablants évoquent des surfacturations et des versements à des entreprises fantômes, transformant Bukanga-Lonzo en gouffre financier.

Le renvoi de l’instruction au 23 avril n’est pas une surprise pour les habitués de ce marathon judiciaire. Depuis le début, le procès avance à pas de tortue, ponctué de reports et de débats procéduraux. Ce dernier ajournement, décidé pour permettre aux avocats de mieux affûter leurs arguments, alimente les spéculations. Certains y voient une volonté de temporiser dans un dossier politiquement sensible, d’autres un simple nécessité face à la complexité des preuves à examiner.

Car l’affaire Bukanga-Lonzo n’est pas qu’une question d’argent. Elle cristallise les tensions entre factions politiques en RDC. Matata Ponyo, figure influente et potentiel candidat à la présidentielle, clame son innocence et dénonce une chasse aux sorcières orchestrée pour l’écarter du jeu politique. Ses soutiens, parmi lesquels des voix prestigieuses comme celle du Dr Denis Mukwege, pointent du doigt une justice instrumentalisée, incapable de garantir un procès équitable. De l’autre côté, les accusateurs insistent : les responsabilités doivent être établies pour mettre fin à l’impunité qui gangrène les projets publics.

Chaque rebondissement dans ce dossier est scruté, commenté, disséqué. Sur les réseaux sociaux, les Congolais expriment leur frustration face aux lenteurs judiciaires, mais aussi leur espoir qu’un jour, la lumière soit faite sur ce fiasco. Car au-delà des millions dilapidés, Bukanga-Lonzo représente un rêve brisé pour des milliers d’agriculteurs et de citoyens qui espéraient un meilleur avenir.

La Cour constitutionnelle, désormais au centre de l’attention, porte une lourde responsabilité. Son verdict, quelle que soit sa date, sera un test pour la crédibilité de la justice congolaise. En attendant l’audience du 23 avril, l’affaire Bukanga-Lonzo reste un miroir des défis de la RDC : un pays riche en potentiel, mais trop souvent freiné par des scandales et des luttes de pouvoir.

Zola NKOSI, L’INTERVIEW.CD